SMC Lyon Cycle « Marque Employeur » #2 : Comment revisiter sa marque employeur en temps de crise ?

Ce que l’on retient des échanges : 

  • Identifier ses interlocuteurs,
  • Adapter et non stopper ses campagnes marque employeur en temps de crise,
  • Valoriser le volet interne sur lequel s’appuie la marque employeur.

 

« La discussion d’aujourd’hui », rappelle Robin Coulet, fondateur de l’agence Conversationnel et co animateur de cette table ronde, prolonge celle du 6 mai dernier*. Cédric Mendes, Directeur recrutement et marque employeur chez Suez France y avait affirmé : « qu’en général, lorsqu’on met le sujet de la marque employeur sur la table c’est qu’il y a une raison – et souvent un problème. » D’où cette nouvelle discussion autour de l’adaptation de la marque employeur à un contexte de crise.  

« La clé, c’est de savoir précisément à qui on s’adresse, et pourquoi  », Suzanne Castel (Insign).

La mise en œuvre traditionnelle de la marque employeur, explique Suzanne Castel, Directrice générale déléguée Head Coach People & Transformation chez Insign, suit un cycle de vie de cinq grandes étapes. « La veille ou recherche d’emploi, l’entretien, l’onboarding, la vie dans l’entreprise et le départ. La marque employeur doit assurer ces cinq étapes. Je crois que la clé, c’est de savoir précisément à qui on s’adresse, et pourquoi. Qu’est-ce qu’on va chercher ? Plus d’adhésion ? de visibilité ? »

En pratique, la marque employeur doit être présente sur tous les réseaux sociaux. Delphine Antunes (Social Media Manager marque employeur) et Dominique Raze (Directrice marque employeur France) de Carrefour, en témoignent : « Avec entre trente-cinq et quarante mille recrutements par année sur trois cent métiers, la marque employeur se doit d’être visible, notamment avec le site « Carrefour recrute », mais aussi sur Facebook, Twitter, Linkedin ou encore Instagram. Nous avons par ailleurs lancé une campagne de recrutement d’alternants sur Snapchat qui a fait douze millions d’impressions », explique Delphine Antunes. Et en ce sens, ajoute Dominique Raze : « une des particularités et des richesses de la marque employeur réside dans le fait qu’il y a de multiples points de contact digitaux mais aussi et surtout humains. »

Ces points de contact humains sont aussi essentiels chez Vinci, comme l’explique Pauline Gondon, Responsable développement RH : « Nous sommes persuadés de la valeur du contact humain dans les RH qui sont aujourd’hui largement digitalisés, et multiplions ainsi les rencontres en face à face, la mise en relation des opérationnels avec les publics intéressés par Vinci, etc. A côté de cela, nous avons aussi une action digitale sur les réseaux sociaux ou avec des plateformes telles que jobteaser qui se greffent sur l’intranet des écoles que l’on cible. »

« Parce que la réputation employeur et la recherche d’emploi passent par le digital, la marque employeur est très exposée », Dominique Raze (Carrefour).

Si telle est donc la marche de la marque employeur en temps normal, celle-ci doit être réajustée en temps de crise. Dominique Raze (Carrefour) explique : « Difficile de tenir la double position par exemple d’un plan de départs volontaires et d’un recrutement qui se poursuit, sur d’autres types de métiers. Justement parce que la réputation employeur et la recherche d’emploi passent par le digital, la marque employeur est très exposée. Dans ce cas-là, l’une des solutions est de promouvoir ses métiers-cibles sans mentionner explicitement un recrutement. »

Le dernier trimestre a nécessité une profonde redirection de la marque employeur. Suzanne Castel (Insign) raconte ce qu’il en a été à la SNCF : « Pour continuer le travail de la marque employeur, nous leur avons expliqué l’importance de rassurer les candidats, ce qu’ils ont mis en oeuvre avec un certain nombre de lives, par exemple. » Cédric Mendes (Suez France), a constaté la même nécessité de s’adapter : « Nous avions prévu une campagne marque employeur sur les métiers orientés environnement, mais on l’a laissée de côté pour valoriser les collaborateurs en première ligne qui ont maintenu la continuité de service – assurer la collecte des déchets, veiller à la qualité de l’eau potable.»

Dominique Raze (Carrefour) partage également les premières conclusions de la crise sanitaire du Covid-19 : « Nous étions en pleine campagne de recrutement d’alternants. Si Carrefour a maintenu ses engagements en termes de nombre de postes ouverts, nous avons réduit la voilure de la campagne pour laisser place à d’autres types de contenus. Mais nous avons été surpris de constater que les étudiants demeuraient connectés, et nous avons d’ailleurs multiplié par trois ou quatre la volumétrie des candidatures. »

« Cette crise, c’est peut-être aussi un gain en termes d’engagement des employés », Cédric Mendes (Suez France)

Difficile de continuer d’incarner l’identité de marque dans un contexte de crise. Cédric Mendes (Suez France) évoque ainsi une campagne de recrutement d’alternants réalisée sous forme de concours de selfie : «  Nos alternants Suez se photographiaient chez eux, parfois avec le visage masqué : pas toujours des clichés souriants en situation de travail que nous souhaitions. Cela a littéralement changé la physionomie de la campagne, même si les objectifs ont cependant été atteints. »

 

Cependant, la marque employeur peut tirer de la crise des enseignements. Ainsi : « s’il serait faux de dire que la crise a fait émerger la raison d’être de Carrefour, elle a fait prendre conscience, ainsi qu’à nos collaborateurs, de l’utilité du métier de distributeur alimentaire », explique Dominique Raze (Carrefour).

Précisément, la crise a mis en lumière l’importance de la marque employeur en interne. Cédric Mendes affirme ainsi l’importance de la confiance en l’entreprise : « Les collaborateurs nous ont renouvelé leur confiance en voyant avec quel sérieux l’entreprise ajustait les conditions de travail, que les dirigeants se rendaient sur le terrain pour remercier les équipes. Cette crise, c’est peut-être aussi un gain en termes d’engagement des employés. »

Suzanne Castel (Insign) évoque deux éléments importants dans la “vie dans l’entreprise” : « D’abord, le sujet du management, qui est un élément-clé de l’incarnation de la marque employeur. Le management à distance a été un défi pendant la crise, tant pour les managers que les managés. Il faudra voir quelles conséquences s’ensuivront. D’autre part, le contexte d’incertitude né de la crise va perdurer. Cela va imposer aux employeurs de traduire en actes concrets leur stratégie marque employeur, car les candidats comme les collaborateurs vont y être attentifs. » Tout l’enjeu, confirme Dominique Raze (Carrefour), est dans l’après-Covid : « Il y aura moins de postes et plus de demandes. Des pistes de travail pour la marque employeur tourneront autour de l’anticipation et de la gestion de la déception d’une réponse négative donnée aux candidats. » C’est donc davantage dans l’après-crise, en somme, que la marque employeur va être mise à l’épreuve.

 

Sources:

*https://socialmediaclub.fr/2020/05/25/smc-lyon-cycle-marque-employeur-1-la-strategie-construire-une-marque-employeur-forte-les-etapes-cles/