Cycle «plateformes sociales : évolutions et usages» – Les transformations de LinkedIn et l’uniformisation des plateformes

Ce que l’on retient des échanges :

  • Pour satisfaire l’algorithme et optimiser sa visibilité, il est nécessaire de varier les contenus, les médias et de limiter les liens externes.
  • Les entreprises performent davantage lorsqu’elles privilégient le partage de contenus authentiques et émouvants à des messages commerciaux, souvent trop récurrents.
  • Dans un contexte où la vie des entreprises est traversée par les questions sociétales, les débats émergent également sur LinkedIn.

 

Acteur incontournable du B2B et du recrutement, LinkedIn va désormais bien au-delà de sa vocation première de plateforme de CV en ligne. Son algorithme pousse des contenus de plus en plus personnels. Quelles particularités conserve-t-elle face à l’uniformisation des plateformes? Comment change-t-elle la donne en matière de personal branding? Quelles seront ses évolutions futures?

 Avec 21 millions de membres en France, 740 à travers le monde, la plateforme américaine est devenue un levier professionnel incontournable. « LinkedIn est une extension digitale du réseau que l’on tisse chaque jour et permet de voir qui est en contact avec qui », souligne Sylvie Lachkar, Global Social Media Lead pour SAP, groupe mondial de vente de logiciels. La recette de la plateforme est simple et n’a pas varié depuis sa création, en 2002 : se connecter professionnellement avec les gens qui nous intéressent.

Pourtant, son utilisation a évolué. Ses membres se sont approprié de nouvelles fonctionnalités (likes, stories, chat,…) qui rejoignent celles que l’on peut trouver sur les autres réseaux sociaux. « Le changement le plus radical sur LinkedIn, c’est le partage de contenus, qui a explosé depuis quelques années », analyse Cédric Pirot, Responsable Marketing Digital BtoB chez Essilor France. Avec ces partages, il s’agit désormais de présenter une vitrine de son activité professionnelle et personnelle. « Et pour faire rentrer les clients dans le magasin, il faut un maximum de choses dans la vitrine », ajoute Sylvie Lachkar (SAP).

 

Varier les contenus pour intéresser son audience et comprendre l’algorithme

Les professionnels présents recommandent de ne pas multiplier les messages commerciaux à longueur de feed – certains théorisant une proportion d’une prise de parole à visée strictement commerciale sur dix. Le contenu posté sur LinkedIn doit être avant tout personnalisé, varié et faire ressortir une personnalité. « Pour être pertinent, on ne peut pas partager uniquement des photos avec des descriptifs », témoigne Emilie Le Guernic, communication specialist chez Axa Luxembourg. Sur LinkedIn, pour attirer l’attention, elle a choisi de se mettre en scène, souvent en vidéo, avec un ton décalé. Résultat ? « Je me détache dans le paysage LinkedIn au Luxembourg », juge-t-elle.

 Malgré sa volonté de varier les contenus et de s’investir dans sa communication, l’utilisateur reste dépendant de l’algorithme de LinkedIn. Secret, il change constamment et seule la pratique permet de mieux l’appréhender. Quelques éléments à garder en tête : la plateforme américaine privilégie les contenus à valeur ajoutée, notamment enrichis de vidéos et de photos. Elle aime également les interactions : les likes, les commentaires et les mentions. En revanche, la publication trop régulière n’est pas conseillée, tout comme le partage de liens externes, qui dirigent vers une sortie du site, ou de l’application, et que l’algorithme aura tendance à sanctionner.

Il faut aussi réussir, selon les trois intervenants, à faire passer des émotions. « Il faut humaniser  les posts partagés. A la manière de ce que je suis dans la vie, sur LinkedIn, je suis solaire et enjouée. La clé de la réussite c’est de rester authentique », conseille Chloé Murtas, Community Manager pour The Adecco Group et animatrice de cette session. « Les contenus que j’apprécie sont ceux basés sur l’émotion », abonde Cédric Pirot.

 

LinkedIn va-t-il supplanter Facebook, Twitter et Instagram ?

 Y a-t-il des sujets tabous sur LinkedIn ? Les professionnels de la communication désapprouvent le partage des avis politiques. « Nos collaborateurs ne parlent pas de politique sur LinkedIn car leur opinion pourrait être assimilée à celle d’Adecco », estime Chloé Murtas. Pour autant, la vie des entreprises est traversée par les questions sociétales comme l’égalité salariale entre les hommes et les femmes qui n’épargnent pas la plateforme américaine. « Des débats sociétaux émergent sur LinkedIn et c’est vivifiant », reconnaît Jean-Maxence Granier, directeur et fondateur d’un cabinet de conseil spécialisé dans les médias et les marques, Think-Out.

 Débats sociétaux, réseautage, mise en scène de son image, l’utilisation de LinkedIn rejoint finalement celle des autres réseaux sociaux. LinkedIn pourrait-il tous les absorber? L’hypothèse de sa victoire sur Facebook, Instagram ou Twitter est intéressante et souscrit à l’idée que la vie professionnelle prend une place grandissante. La multiplication du télétravail, le peu de temps laissé aux loisirs par la crise sanitaire et l’absence de déconnexion tendent à rendre la limite entre vie professionnelle et personnelle d’autant plus poreuse. Cédric Pirot fait néanmoins remarquer que « LinkedIn n’a pas d’intérêt à être la plateforme de toutes les plateformes »

Le réseau social américain n’en continue pas moins d’évoluer: « Une marketplace est en train de se mettre en place pour permettre aux entreprises de payer les freelances sur la plateforme », rappelle Emilie Le Guernic.

Pour Sylvie Lachkar, le salut viendra d’une meilleure utilisation des groupes de discussion : « Ils créent de l’intimité entre les clients et les entreprises. Mais sur LinkedIn, ce sont pour l’instant des monologues sans beaucoup d’interactions. » De son côté, Cédric Pirot attend LinkedIn sur l’événementiel en ligne. « Il faut des meetings rooms pour que l’on puisse organiser des événements en ligne », conclut-t-il.

 

Cette session, animée par Chloé Murtas (The Adecco Group), a été organisée le 2 mars 2021 en visioconférence.

Avec Sylvie Lachkar (SAP), Emilie Le Guernic (Axa Luxembourg) et Cédric Pirot (Essilor France).

Compte-rendu rédigé par Martin Fort.