SMC #Focus – Le gaming est-il le réseau social de demain?

Ce que l’on retient des échanges :

  • Contrairement aux réseaux sociaux qui captent l’attention, mais limitent les interactions sociales, les plateformes sociales liées aux jeux vidéo (Discord, Twitch) permettent des échanges développés et concrets.
  • L’authenticité, le respect des codes des joueurs et du type de langage employé sur les plateformes vont permettre à la marque de proposer, au-delà du placement de produit, une expérience gaming originale.
  •  la logique de « gamification » tend à prendre le dessus dans les échanges sur Internet, ce qui favorise l’aspect naturel, fluide, authentique et engageant des échanges, notamment entre la marque et son audience. 

Longtemps considéré comme un simple divertissement, le jeu vidéo est devenu un vecteur de lien social et compte aujourd’hui près 2,7 milliards de joueurs à travers le monde. Ces plateformes de jeu peuvent-elles remplacer les réseaux sociaux? Discord, Twitch, Animal Crossing, Fortnite, League of Legends … comment fonctionnent- ils?  Comment les marques s’intègrent dans cet écosystème virtuel? Cette session tente de décrypter cet environnement du gaming, qui devient  de plus en plus social.

Pourquoi associer les plateformes de jeux aux réseaux sociaux? 

La dynamique sociale du gaming est de plus en plus au cœur des réflexions marketing des marques. Pour Fabien Gaetan, Head of Gaming & Social Entertainment chez We are Social, «la communauté gaming génère beaucoup d’interactions, de conversations. La pratique et l’expression communautaire sont en train aujourd’hui de dominer le paysage social.»

Le jeu vidéo est un espace d’échange qui s’étend. Le fait que l’OMS considère le jeu vidéo comme un «outil social» a participé à démystifier le gaming et sa communauté de joueurs, comme le souligne Fabien Camier, global creative strategist chez Gameloft : «il y a un aspect systématiquement consumer centric du jeu vidéo. Discord comme Twitch sont des univers éminemment qualitatifs et utiles, ayant une capacité à engager.» Contrairement aux réseaux sociaux qui captent l’attention, mais limitent les interactions sociales, les plateformes sociales liées aux jeux vidéo (Discord, Twitch) permettent des échanges développés et utiles. «Pour moi, le gaming est un média à part entière, je fais le travail que faisaient les commerciaux des premières agences de communication digitale», ajoute-t-il. Robin Coulet, fondateur et CEO de Conversationnel et animateur de cette session, parle de socialisation pour certaines plateformes, et de jouabilité pour d’autres : elles sont complémentaires.

 

Comment être présent en tant que marque sur les plateformes gaming? 

Il est plus facile pour les marques en lien avec l’univers du jeu vidéo d’être présentées et acceptées par la communauté des utilisateurs. C’est le cas d’Asus. Pour Jonathan Angel, directeur Marketing et Communication chez Asus France, les utilisateurs achètent naturellement le matériel informatique que la marque développe : «la particularité de la cible des gamers est que leur engagement est plus important, ils donnent plus facilement des retours construits sur les produits utilisés.» Selon lui, Discord et Twitch sont les deux plateformes qui permettent d’approcher les communautés de joueurs et de faire «les plus belles activations.»

Dans l’univers du jeu vidéo, il est difficile d’approcher sa cible, y compris en tant que marque endémique, car les communautés sont méfiantes et ont un regard très critique sur les marques, surtout si elles viennent perturber l’expérience de jeu. Il faut donc ajouter de la valeur à cette expérience en étant créatif et surtout en comprenant les codes, le ton des joueurs sur les plateformes d’échanges utilisées. Pour Jonathan Angel (Asus), la clé se situe dans l’authenticité : « il ne s’agit pas de simplement réussir à vendre quelque chose, mais d’avoir une stratégie, du contenu, et de s’investir presque émotionnellement dans sa promotion. Il faut comprendre les jeux et finalement, être joueur soi-même

Pour les marques qui ont déjà de l’influence, comment s’intégrer dans la jouabilité? De la même façon, c’est en s’inscrivant dans les codes du jeu vidéo. Arnaud Robin, head of gaming chez Swipe Back, prend l’exemple du succès de Wendy’s sur Fortnite qui se positionne en tant que marque au sein du jeu via le logo, mais surtout en tant que joueurs. Contrairement à Burger King qui avait fait un flop sur Twitch en envoyant des messages aux streamers concernant leurs menus. 

La marque ne doit pas être intrusive : «L’important est de ne pas gâcher l’expérience de l’utilisateur et de se demander quelle valeur la marque va apporter à cette expérience», estime Fabien Gaetan (We are social).

 

Quelle immersion pour les marques dans le jeu vidéo?

De son côté, Fabien Camier (Gameloft) se concentre d’abord sur la connaissance de la marque et sur les datas recueillies concernant les réactions de la cible visée, avant de créer dans un jeu vidéo. 

Puis vient l’intégration native, où la marque s’intègre «intelligemment» dans le jeu, comme a pu le faire LEGO dans Minion Rush. Enfin, l’étape ultime concerne le développement d’un jeu à part entière avec une marque, où le jeu doit raconter une histoire (comme Kinder avec le jeu vidéo Applaydu). «Dans ce cas, on se connecte à l’audience, qui a besoin de plus que de l’expérience physique.» Arnaud Robin (Swipe Back) rajoute celle de la conception du jeu : «Quand on crée une expérience dans un jeu, il faut la concevoir en faisant en sorte qu’elle soit porteuse de valeurs, mais également qu’elle soit intéressante à consommer pour ceux qui ne sont pas forcément utilisateurs de jeux.»

 

KPIs sur les plateformes de gaming

Les streamers et les gamers ont accès à toutes les datas intéressantes (KPIs de visibilité, d’engagement, d’interaction, le nombre de followers et de clics sur les liens dans les messages, de commentaires, etc.) Pour les marques, le KPI intéressant est celui autour des « conversations qui se créent par la communauté autour d’une campagne, soit un KPI de branding», précise Fabien Gaetan (We are Social). Les chiffres généralistes sont facilement trouvables, mais sur les plus petits jeux, cela est plus compliqué. «Dans le cadre d’une collaboration avec un studio de jeu vidéo, la data est mise à disposition en interne, mais si le but est de hacker, ce n’est pas forcément le cas», explique Arnaud Robin (Swipe Back). Pour lui, l’enjeu de demain est d’obtenir des data issues des jeux eux-mêmes, et pas uniquement des plateformes sociales. Cela favoriserait le développement d’une nouvelle économie.

L’approche média, tout comme l’approche expérientielle, est possible, mais il est plus difficile pour cette dernière de mesurer les retombées. Selon Arnaud Robin (Swipe Back), «d’un côté, l’approche expérientielle  permet de comprendre les joueurs et de définir une stratégie impactante, et de l’autre l’approche plus traditionnelle permet d’afficher quelque chose.» Jonathan le résume ainsi : «on peut presque parler de quantitatif VS qualitatif, et en tant que marque, nous aimons avoir les deux, toucher et engager.»

 

Les marques et le gaming de demain

«Les comportements et l’engagement des internautes sur les environnements virtuels sont le prochain pilier d’Internet. Cela va créer le métaverse, c’est-à-dire que les mondes virtuels vont remplacer les pages web», se projette Arnaud Robin (Swipe Back). Pour Fabien Gaetan, la logique de « gamification » tend à prendre le dessus dans les échanges sur Internet, ce qui favorise l’aspect naturel, fluide, authentique et engageant des échanges, notamment entre la marque et sa cible. 

Pour conclure, le gaming n’en est plus au stade de pop-culture : il se pose comme nouveau format de langage, d’interaction et de co-création à exploiter. «L’enjeu pour les marques est de parvenir à suivre l’accélération des pratiques et de se renouveler  en créant constamment de nouveaux formats », conclut Jonathan Angel (Asus).

Cette session animée par Robin Coulet, Fondateur et CEO de Conversationnel a eu lieu le jeudi 24 juin 2021 en visioconférence. Avec Jonathan Angel, directeur marketing et communication – Asus France, Fabien Camier, Global creative strategist – Gameloft, Fabien Gaëtan, Head of gaming & Social Entertainment – We are Social France, Arnaud Robin, head of gaming – Swipe Back. Compte rendu rédigé par Maëva Dussault.