Commission Social Data: Comment mesurer l’influence ?

Ce que l’on retient des échanges:

  • La proximité de la marque avec un influenceur et son engagement sur la durée sont les maîtres-mots dans la stratégie d’influence.
  • Les KPIs diffèrent selon les objectifs et dépendent du service qui porte le projet.
  • Une analyse fine de la tonalité de l’engagement d’une communauté à chaque étape stratégique permet de garantir l’efficacité d’une campagne d’influence.

 

L’influence, nous rappelle Clément Brygier, cofondateur & CEO de Digital Insighters et coanimateur de cette table ronde, c’est «l’action généralement continue qu’exerce quelque chose sur quelqu’un». En entreprise, l’influence peut être liée directement à la vente, mais aussi au branding: c’est un moyen de penser les KPIs en relation avec les enjeux marketing de l’influence. Alors comment s’incarne cette influence et comment la mesure-t-on?

 

Quelle stratégie de marketing d’influence en entreprise ?

Les réseaux sociaux sont évidemment primordiaux dans la construction de cette stratégie. Robin Caillaud, Head of e-Commerce du Slip Français, souligne que la marque s’est construite sur ce modèle, à travers différentes typologies d’influenceurs: les micro-influenceurs et influenceurs organiques avec qui la marque «essaie de nouer des échanges sous une forme conversationnelle, autour de valeurs communes, de discussions transparentes et honnêtes», et d’autre part les macro-influenceurs Paid via des plateformes dédiées de sourcing, des agences ou des partenaires d’affiliation. Il fait le bilan: «on a environ 30% de macro-influenceurs et 70%  de middle/micro-influenceurs.»

«C’est l’engagement et la qualité des échanges avec les influenceurs qui compte avant tout. On préfère faire de la proximité et de la qualité plutôt que de la masse.» Robin Caillaud (Le Slip Français)

« L’influence est à la fois un levier de branding et un levier de performance», mais chaque créateur de contenus a son domaine de prédilection et ce qui importe, c’est que «les influenceurs collent avec nos valeurs de marque», poursuit Robin Caillaud. Pour la marque, ce n’est pas la taille de communauté de l’influenceur qui compte, mais la qualité et la quantité de ses prestations par rapport à un objectif fixé et le type de campagne souhaité. Proximité et engagement restent les deux maîtres-mots dans la stratégie d’influence: «C’est l’engagement et la qualité des échanges avec les influenceurs qui compte avant tout. On préfère faire de la proximité et de la qualité plutôt que de la masse.»

Sarah de Henau, Responsable RP, influence et Social Media de Philips, privilégie elle aussi l’influence aux RP, et s’en charge seule en collaborant régulièrement avec les marketing et campaign managers à l’aide du test and learn, tout simplement. Chez Philips, « On est accompagnés par des agences qui soit nous génèrent de la visibilité, soit de la performance. »

 

KPI et rapport aux influenceurs: qui doit s’occuper de l’influence?

Chez Philips, les KPI diffèrent selon les objectifs. Mais pour Sarah de Henau, les statistiques liées à l’influence sont faussées: « Aujourd’hui, on ne peut pas avoir accès à des statistiques fiables de notre influence. Instagram (depuis le RGPD) ne nous fournit pas les bons metrics. C’est une science incertaine et inexacte, on ne saura jamais faire l’opération parfaite.»

Qui doit s’occuper de l’influence? Tout dépend encore une fois de l’objectif. Pour 62% des participants à cette session du Social Media Club, c’est à la communication et aux RP que revient cette tâche (voir le sondage mené auprès des participants ci-dessous). Si le marketing d’influence est un domaine tendance, expérimenté par de nombreux acteurs, il est nécessaire de trouver la juste collaboration entre les influenceurs, l’entreprise et  les plateformes, qui peuvent avoir tendance à déshumaniser la relation. «La base de l’influence, c’est d’avoir une relation authentique, durable, pour nous permettre de gagner en crédibilité auprès des communautés. Nous préférons travailler avec 10 influenceurs vraiment impliqués sur une année, plutôt qu’avec des opportunistes qui se sont créé des fausses communautés.» précise Robin Caillaud. C’est également le cas de Sarah de Henau qui collabore avec différents ambassadeurs chez Philips, qu’elle active sur de nouvelles campagnes lorsque la première collaboration a bien fonctionné.

Pour toucher qualitativement une audience, il faut que celle-ci ressente l’honnêteté de l’influenceur, qui se place comme medium entre la marque et sa cible: «Je pense que si les influenceurs s’approprient bien les produits, ça se ressent et ça a donc beaucoup plus d’impact», pointe justement Robin Caillaud.

 

Qu’est-ce qu’un bon influenceur ?

Certainement un influenceur qui privilégie la qualité à la quantité dans ses collaborations avec les marques, mais également qui ne soit pas trop « propice » à faire du bad buzz. Cela s’anticipe par une analyse des comptes, des posts et des réactions ou commentaires qu’ils suscitent. «Je préfère travailler avec des influenceurs qui ont une ligne édito qui ne fait pas vitrine de magasin et qui n’ont pas bossé avec 30 partenaires différents par mois», avoue Sarah de Henau. Mais c’est sans doute aussi un influenceur qui sache rester aux côtés de la marque en cas de crise, et qui soit ouvert au dialogue. Il est bon pour la marque que l’influenceur soit engagé à moyen/long terme. A la suite de la polémique dont Le Slip français a fait l’objet il y a quelques mois, la marque a réagi en privilégiant la discussion avec les différentes parties prenantes, autant avec les équipes internes, les influenceurs que les consommateurs.

 

Objectifs et taux d’engagement

Le taux d’engagement visé oriente la sélection des influenceurs, ce que Sarah de Henau met en lumière de la façon suivante: «Plus la communauté de certains influenceurs augmente, plus le taux d’engagement diminue. Je préfère prendre des plus petits influenceurs avec un très haut taux d’engagement que prendre de gros influenceurs avec un faible taux d’engagement. On essaie de privilégier des contenus créatifs, engagés.» Pour Robin Caillaud, se positionner sur le taux d’engagement, c’est avant tout prendre en compte le profil de l’influenceur et la campagne dont il est question: «On regarde les commentaires et discussions autour des posts de l’influenceur, on essaie d’avoir un filtrage précis.» Pour lui,  «un taux excellent approche les 5-10% , mais il peut cacher des commentaires négatifs, donc il est important de faire correspondre le taux d’engagement avec la tonalité de cet engagement.»

« Le taux d’engagement et la qualité du contenu sont donc la clé du succès», résume Charlotte Clemens, Managing Director France de Talkwalker, et coanimatrice de la table ronde.

 

Sur les réseaux sociaux, Sarah de Henau privilégie les stories Instagram aux posts, car «l’algorithme d’Instagram n’aide pas les créateurs », ainsi que TikTok, où la visibilité est démultipliée depuis quelques temps. Pour les dix ans du Slip Français, Robin Caillaud et ses équipes travaillent également sur des contenus exclusifs avec TikTok : c’est un outil formidable pour toucher un public jeune, puisqu’environ 75% des utilisateurs de la plateforme ont moins de 25 ans.

 

Quels outils dans la gestion de l’influence ?

Pour Sarah de Henau, couplées à une agence «qui s’occupe d’une stratégie avec un budget dédié, qui crée une campagne autour d’un hashtag spécifique », les plateformes freemium telles qu’Hivency ou Octoly ont toute leur importance. Les marketplaces (Influence for You, Reach) ou les agences RP peuvent aussi être de bons leviers.

 

Et demain?

Les influenceurs deviennent des médias à part entière. il ne faut pas sous-estimer leur poids: « Aujourd’hui les gens passent plus de temps à regarder les réseaux sociaux que la télé. On sait que les écrans publicitaires sur les médias traditionnels (télévision, affichage) fonctionnent de moins en moins», confirme Robin Caillaud, qui s’attend dans le futur à une vraie collaboration entre intermédiaires et  influenceurs, avec une valorisation des contenus authentiques.

Enfin, il convient de garder en tête la nature évolutive de l’influence. S’il y a actuellement une vague intéressante avec TikTok, une autre plateforme peut émerger dès demain. Pour Sarah de Henau, il est donc d’autant plus important de «faire de la veille, de s’informer, de regarder ce qui marche ou ne marche pas. C’est un vrai travail qui prend du temps. Intéressez-vous le plus possible aux conférences et aux sujets influence, parce que cela évolue très vite.» Le Social Media Club est d’ailleurs là pour ça!